Pétroglyphes – Les pierres de Jelling

Les pierres runiques de Jelling au Danemark marquent un tournant dans l’histoire de ce pays et ses traditions au Xe siècle avant J.C. : deux pierres, érigées en 960, seront gravées d’inscriptions sous les ordres du roi Gorm l’Ancien (964†) puis de son fils Harald 1er dit Harald à la dent bleue (985†). La plus grande célébrera ses parents et ses propres succès avant de devenir une des inscriptions runiques les plus connues. Bien que d’autres objets ont pu témoigner de l’expansion du christianisme antérieurement au Danemark, la grande pierre de Jelling atteste clairement de l’adoption de cette nouvelle religion sous Harald 1er, converti et baptisé aux alentours de 980.

Ses trois faces gravées commémorent ce changement avec :

  • Une face remplie d’inscriptions runiques
  • Une face avec des motifs ornementaux et des représentations d’animaux
  • Une face avec la plus ancienne représentation scandinave du Christ crucifié

La traduction des inscription runiques donne un abrégé de la vie d’Harald 1er, honorant ses parents et célébrant ses conquêtes :

Le roi Harald fit faire ces stèles pour Gorm son père et de Thyra sa mère.
Harald conquit le Danemark entier et la Norvège et fit chrétiens les Danois.

Cette conversion progressive au christianisme se fit dans une période de structuration du pouvoir royal au Danemark : le commerce maritime se développe avec de nouveaux navires marchands, encourageant le développement des villes existantes ou la création de nouvelles, la monnaie danoise se stabilise dans sa forme, l’autorité royale est mise en avant avec la construction de monuments en l’honneur du roi ou de pierres runiques telles que celles de Jelling.

Au-delà des aspects économiques et politiques, la conversion à la foi chrétienne participa également à ce renforcement de l’autorité centrale, remplaçant progressivement la tradition en place. En effet, le père d’Harald 1er mentionné sur cette inscription runique, Gorm l’Ancien, était quand à lui resté attaché aux traditions païennes vikings. Enterré sur le site sacré de ses pères à Jelling dans un tumulus au côté de sa femme Thyra, son corps fut par la suite déplacé par son fils dans la nouvelle église en bois bâtie sur le même site.

Aquarelle de Magnus Petersen (1871)
Excavation d’une grande pierre au cimetière de Jelling avec l’église et les tumulus en arrière-plan

On connait de nos jours plusieurs copies de ces pierres dont celle conservée à Copenhague ou encore celle située en France à Rouen. Offerte par le Danemark à l’occasion du millénaire normand en 1911 — cet événement célébrant le 1000e anniversaire de la fondation du duché de Normandie par le traité de Saint-Clair-sur-Epte, cette copie se trouve désormais dans les jardins de l’abbatiale de Saint-Ouen.

Copie de la plus large pierre de Jelling avec vue sur les deux faces décorées, peintes comme l’originale
Musée national du Danemark
Arc de triomphe rue Jeanne-d’Arc à Rouen lors du millénaire normand
Sources :
- Musée National du Danemark - The Jelling Stone
- Kenneth S. Latourette - A History of Christianity: Volume I - The conversion of the Scandinavians
- UNESCO World Heritage - Jelling Mounds, Runic Stones and Church
- Scandinavian Runic-text Data Base Rundata - Incription runique DR 42
- Memorial essay on some phases of the maritime life of France and England directly traceable to the vikings - Archive